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Forte hausse des rejets de demandes d’immigration humanitaire au Canada en 2020

Le Canada a rejeté 5000 demandes de résidence permanente pour des considérations d’ordre humanitaire en 2020, soit plus que jamais observé en cinq ans. Le taux de refus a ainsi bondi de 20 % en pleine pandémie, sans que les politiques gouvernementales aient officiellement changé, a dénoncé en conférence de presse mardi le Réseau des droits pour les personnes migrantes.

Souvent décrit comme « la démarche de la dernière chance », le dépôt d’une demande pour des considérations d’ordre humanitaire est la seule voie d’accès à la résidence permanente pour les personnes sans statut.

Bien que la quantité de demandes de ce type ait augmenté l’année dernière, le nombre total de personnes acceptées a diminué, selon les données du ministère fédéral de l’Immigration.

Ottawa a dit non à 2240 personnes de plus en 2020 qu’en 2019. Le taux de refus était aussi nettement plus haut en cette année de pandémie, avec 57 % des demandes rejetées, contre 37 % en moyenne entre 2016 et 2019.

« Nous ne comprenons pas ce qui se passe. Il n’y a pas eu de changement de politique, pas d’annonce », a exposé Syed Hussan, du secrétariat du Réseau des droits pour les personnes migrantes.

Les demandes pour considérations d’ordre humanitaire sont examinées au cas par cas par un agent d’immigration. Des facteurs relatifs à la santé, à la violence familiale, aux liens avec le Canada, à l’intégration et à l’intérêt des enfants peuvent être pris en considération. « Ce processus est extrêmement arbitraire », a appuyé le consultant en immigration Macdonald Scott, du cabinet Carranza LLP.

Dans les autres catégories d’immigration aussi, le nombre de personnes admises pour la résidence permanente a connu une « chute historique », note l’organisation. Seulement 184 000 personnes l’ont obtenue en 2020, alors qu’en comparaison, l’objectif pour 2021 est de 401 000 personnes.

57%  C’est le pourcentage des demandes d’immigration humanitaire rejetées en 2020, contre 37% en moyenne entre 2016 et 2019.

Ni la pandémie ni les délais administratifs n’expliquent cependant la hausse du taux de rejet, puisque ces immigrants ont bel et bien reçu une réponse de la part du ministère de l’Immigration.

« En doublant les refus, le premier ministre Trudeau double le potentiel d’exploitation », a insisté M. Hussan. La décision sur un dossier de recours d’ordre humanitaire est prise par un seul individu, c’est-à-dire un agent d’immigration, mais « il y a clairement une tendance systémique au rejet », poursuit-il.

Ce sont particulièrement les personnes racisées et occupant des emplois mal rémunérés qui sont rejetées, avance l’organisation, sans pouvoir cibler de pays d’origine en particulier. Les demandes de personnes originaires du Nigéria, d’Haïti et de l’Inde ont particulièrement augmenté ces deux dernières années, selon d’autres données.

Des rejets qui font mal

On observe un taux de refus encore plus haut au premier trimestre de 2021, signe que la tendance se maintient. Sept immigrants précaires dont la demande a été rejetée cette année en ont d’ailleurs témoigné en conférence de presse.

Mamadou Batchily, 44 ans, a raconté sa détresse. Travailleur dans une usine alimentaire à Montréal, il dit avoir subi une blessure en 2018, puis avoir vu sa demande pour motifs humanitaires refusée en janvier 2021. « J’ai été affaibli par ce processus douloureux. Je vois que le Canada n’accorde aucune valeur à la vie humaine », a affirmé l’homme qui n’a pas vu sa femme et ses deux enfants depuis six ans.

Une femme vivant à Vancouver, Devine Cruz, a quant à elle décrit comment elle s’est retrouvée sans statut aux mains d’un employeur peu scrupuleux. Il l’aurait recrutée comme aide familiale depuis Hong Kong, la faisant ensuite venir au Canada grâce à un visa de touriste, puis l’aurait forcée à demeurer à son emploi jusqu’à l’expiration de son visa. « Je me sens pénalisée parce que je suis pauvre. Mon employeur riche qui m’a amenée ici illégalement peut entrer et sortir du Canada alors que je me cache », a-t-elle relaté.

J’ai été affaibli par ce processus douloureux. Je vois que le Canada n’accorde aucune valeur à la vie humaine.  — Mamadou Batchily

 

Le Réseau pour les droits des personnes migrantes estime que près d’un demi-million de personnes sont sans statut au Canada. Une grande partie de ces individus sont arrivés sur le territoire sur des visas qui ont ensuite expiré et ne sont pas admissibles à d’autres programmes d’immigration. Certaines demandes concernent des familles avec des enfants qui ont passé la majorité de leur vie ici, selon les témoignages présentés.

Le gouvernement fédéral a annoncé plusieurs programmes pour donner accès à la résidence permanente aux personnes déjà sur le territoire, comme les travailleurs temporaires et les étudiants. Québec a toutefois refusé de participer à plusieurs de ces programmes.

Le pays a besoin d’immigrants comme l’a révélé encore davantage la pandémie de COVID-19, a plaidé M. Hussan. « Au lieu [de les accepter], on voit des agents faire le contraire de manière arbitraire », s’est-il désolé.

Source : LeDevoir par Sarah R. Champagne,

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